Phyto-Aromes
Ephedra
Les parties vertes et les rameaux florifères de l’Ephédra sont utilisés en Chine, depuis des siècles, sous le nom de Ma Huang. Tchang-King, dans ses Recettes du coffret d’or, nous parle de l’Ephédra comme remède à utiliser dans les affections respiratoires, et l’Ephédra est une des 365 drogues végétales citées dans le Nei king, premier des traditionnels Pen ts’ao. Les Indiens du Pérou employaient l’Ephédra, à l’époque précolombienne, pour calmer les douleurs, bien qu’ils témoignaient d’une très grande résistance naturelle à la douleur.
L’Ephédra sert surtout, en médecine, pour l’extraction de son alcaloïde actif, l’éphédrine, qui est, comme on l’a dit, une véritable « adrénaline végétale », utilisée dans l’asthme, la dyspnée, le rhume des foins, les maladies allergiques (dermatoses prurigineuses, urticaires, œdème de Quincke), l’hypotension permanente, etc. Les espèces européennes et américaines ne renferment pas assez d’éphédrine pour servir à l’extraction, et seules les espèces d’Extrême-Orient sont actives.
Orge
L’Orge était estimée des médecins de l’Antiquité que le père de la médecine, le grand Hippocrate, lui consacra tout un livre. Il l’ordonnait dans le début de toutes les maladies aigües sous forme de ptisane légère ou encore de krithôdès, qui était une décoction plus épaisse.
Après lui. Galien fut un partisan convaincu de la ptisane, comme d’ailleurs le Byzantin Paul d’Egine, qui la compléta en y ajoutant divers légumes. Au Moyen Age, à la Renaissance, au XVIIème siècle, on attribua à l’Orge des vertus adoucissantes et émolliente en même temps que pectorales et calmantes. Sa décoction était réputée pour « concilier le sommeil » et sa farine pour faire des cataplasmes maturatifs. Déjà, à cette époque, on différenciait l’Orge mondé – c’est -à-dire dépouillé de ses glumelles – de l’Orge perlé – c’est-à-dire décortiqué et comprimé en grain arrondis.
Tous les illustres médecins du XVIIème et XVIIIème siècle, Van Swieten, Sydenham, de Haen, Stoll, ont recommandé l’Orge dans les maladies inflammatoires, les maladies de foie, la dysenterie, la cystite, les débuts de rhume. On la considérait comme un excellent reconstituant et, associé au lait, l’eau d’Orge était la boisson des tuberculeux. La fameuse « tisane de Tissot » n’était rien d’autre qu’une décoction d’Orge, parfumée au jus de Citron ou à la gelée de groseille.
Plus près de nous, l’abbé Kneipp recommandé l’eau d’Orge chez les anémiques, les fiévreux et les dyspeptiques. De nos jours, on a très bien disséqué les propriétés de l’Orge selon ses divers stades de germination. L’Orge est réputée nourrissante, émolliente, rafraîchissante et diurétique.
Le malt, c’est-à-dire l’Orge germée et séchée, tel que l’emploient les brasseurs, est antiscorbutique, tonique et revitalisant. Recommandé aux dyspeptiques, il facilite aussi la digestion des bouillies ordinaires des nourrissons et des malades. On le préconise contre le rhume et les affections catarrhales simples. Torréfié, il peut remplacer le café en décoctions digestives et toniques.
Les Touraillons, c’est-à-dire les petits germes détachés du malt, éliminés par la brasserie, sont réputés contre la diarrhée. Ils contiennent un principe antiseptique, isolé en 1906 par E. Léger. Qui est doué d’une action quasi spécifique à l’égard du Choléra.
La drèche, qui est le résidu du malt épuisé par l’eau, est prônée contre les rhumatismes et les douleurs névralgiques.
La levure de bière, enfin, est renommée contre le scorbut, le diabète, les auto-intoxications et la furonculose.
A l’extérieur, l’eau d’Orge s’emploie encore à la campagne pour laver les ulcères, et la farine sert à confectionner des cataplasmes pour mûrir les furoncles et soulager les œdèmes, les rhumatismes et les lumbagos.
Coquelicot
Déjà cité par Dioscoride, le Coquelicot possède un glorieux passé, puisqu’il était considéré, à l’époque de la Renaissance, comme un spécifique de la pleurésie. Plus près de nous, Chomel le prescrivait “comme un sudorifique plus efficace que le sang de bouc, la fiente de mule et les autres qu’on vante tant”.
La médecine populaire l’utilisait encore il y a peu de temps dans les rhumatismes, les coliques et comme sudorifique conseillé après chaque saignée. Elle l’utilisait aussi dans les toux sèches, les catarrhes pulmonaires, les bronchites, les angines et les coqueluches, et c’est pour ces usages qu’il est encore prescrit de nos jours.
Très adoucissant, le Coquelicot apaise très bien la toux. De plus, jouissant de propriétés calmantes et même légèrement narcotiques, il est précieux dans l’insomnie des enfants et des vieillards, surtout lorsque celle-ci est due à des quintes de toux. Les Arabes dissipent l’insomnie en mangeant à plusieurs reprises dans la journée des graines de Coquelicots pilées dans du miel.
A l’extérieur, on utilise parfois la fleur de Coquelicot contre les maux d’yeux et les abcès dentaires, et la capsule en gargarismes calmants en remplacement de la capsule de Pavot. Le Coquelicot entre dans la fameuse “tisane des 4 fleurs pectorales” (qui, d’ailleurs est composée non pas de 4, mais 7 fleurs).
Esthétique
Associé à d’autres plantes comme la sauge le coquelicot entre dans la préparation de crèmes destinées à corriger les petites imperfections des peaux grasses. L’infusion de 15 grammes de pétales dans un demi-litre d’eau, filtrée, refroidie, constitue une très bonne lotion pour l’entretien de l’épiderme. Elle est également très efficace pour reposer les yeux fatigués ou irrités.
Millepertuis
A l’époque druidique, le Millepertuis était considéré comme une plante bénie, dont l’odeur seule suffisait à chasser les mauvais esprits (son surnom de Chasse-Diable, Fuga démonium, lui vient de l’époque gallo-romaine).
Comme dit le Dr Leclerc , « on remplirait un volume des vertus que les Anciens lui prêtaient… », mais ces vertus d’antan sont, de nos jours, bien oubliées.
Cazin l’utilisait encore, au siècle dernier, contre les maladies de poitrine : asthme et catarrhe bronchique.
La plante était aussi renommée contre les leucorrhées ; Olivier de Serres, déjà, la disait bonne « pour émouvoir les fleurs des femmes ».
Mais la grande renommée du Millepertuis, qui a subsisté jusqu’à nos jours, est d’être un merveilleux vulnéraire, que les chirurgiens de Montpellier estimaient déjà à nul autre pareil.
On l’utilisait à l’intérieur comme cordial et, à l’extérieur, pour les pansements. Sec, il entrait avec la racine d’Angélique, dans le baume de Commandeur, dont l’usage populaire était général, et à l’état frais, avec des tas d’autres plantes aromatiques, il composait l’alcoolat vulnéraire appelé familièrement « eau d’arquebusade ».
De nos jours « l’huile rouge » continue dans certaines régions de France, en Suisse et en Europe Centrale, à cicatriser et aseptiser les plaies et à guérir les brûlures, et c’est sans doute uniquement sous cette forme (ou sous le nom d’Hypericum homéopathique) que le Millepertuis continue à panser nos maux.
Passiflore
Introduite en Europe au XVIIème siècle, la Passiflore ne tarda pas à entrer dans la pharmacopée comme antispasmodique de choix.
Elle eut aussi son poète, P. Contant, apothicaire de province, qui sut la célébrer joliment.
La plante ou ses dérivés sont toujours utilisés de nos jours comme hypnotiques et sédatifs calmants du système nerveux.
Le Pr Renon et le Dr Leclerc ont préconisé la Passiflore dans l’insomnie ayant pour origine l’intoxication alcoolique, la ménopause, la neurasthénie, et chaque fois que « l’obstacle au sommeil est dû à l’excitation cérébrale ». Elle diminue l’angoisse qui s’oppose au repos et calme les soucieux et les surmenés. Le sommeil qu’elle provoque est normal et n’est jamais suivi de dépression nerveuse réactionnelle.
Cadeau qui nous vient du lointain empire des Aztèques à jamais perdu, la Passiflore semble être la plante dont notre civilisation a le plus grand besoin.
Eglantier
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Les Perses tenaient en grande estime le modeste gratte-cul, qui dissolvait les calculs et diminuait les règles trop abondantes, et la fleur d’Eglantier, mélangée avec le suc de la Canne à sucre, passait pour guérir la phtisie… et finir même par réveiller les morts. Au XVIIème siècle, parmi les célèbres remèdes secrets de Mme Fouquet, guérisseuse patentée, il y avait « l’opiat de cynorrhodon », qui resserrait le ventre en cas de diarrhée. Un vieux remède populaire contre la rage consistait à faire absorber à jeun, au mordu, une omelette contenant 60 g de racine d’Eglantier râpée (de là vient, paraît-il, le nom de « Rosier des chiens »).
Astringent, le fruit de l’Eglantier est toujours renommé comme remède contre l’entérite et la diarrhée. On en fait une confiture ménagère agréablement acidulée et une conserve. La décoction est à la fois un antidiarrhéique efficace et un vermifuge contre les ascaris. Quant aux fleurs, elles sont légèrement laxatives.
Grateron ou gratteron
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Peu employé de nos jours, le Grateron passait pour diurétique et antigoutteux. On le recommandait contre la gravelle, et Cazin le préconisait beaucoup contre l’hydropisie. On le trouvait bon contre les troubles circulatoires et capable d’améliorer la circulation du sang chez les vieillards. On l’utilisait aussi dans la jaunisse et la pleurésie.
A l’extérieur, il était utilisé contre les écrouelles, pour arrêter le saignement des plaies et pour résoudre les loupes.
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Cresson
Considéré dans l’Antiquité comme un stimulant, il était aussi employé par Hippocrate comme expectorant et par Dioscoride comme aphrodisiaque.
Thibault Lespleigney, le poète apothicaire tourangeau de la µRenaissance, lui attribuait, à juste titre, de nombreuses vertus et, entre autres, celle de guérir la sciatique et le mal de tête. Récamier, illustre médecin de XIXème siècle, soignait ses malades atteints de phtisie avec deux bottes de Cresson à prendre chaque matin, et complétait ce petit déjeuner étrange par une bonne tasse de lait. Utilisé contre le diabète par Constantin Paul, il l’était par le Dr Leclerc dans les affections du poumon et les catarrhes chroniques des bronches. Cazin combattait par son usage l’atonie générale, l’employait contre toutes les maladies des viscères (foie, rate, vésicule, reins et voies urinaires) et le prescrivait aussi contre la goutte et les rhumatismes. Il a toujours été considéré comme un stimulant, un antianémique et un antiscorbutique de valeur (associé au Raifort, au Cochléaria et au Ményanthe, il entre dans la composition du « vin antiscorbutique »).
De nos jours, on trouve que le Cresson, « la santé du corps », est peut-être, de tous les légumes, celui que possède le plus d’éléments utiles, tant en vitamines qu’en sels minéraux. Il est conseillé aux lymphatiques, aux rachitiques, aux convalescents. On le recommande comme dépuratif dans les maladies de peau, soit seul, soit associé à part égale à la Chicorée, à la Fumeterre, à la Laitue dans le « jus d’herbes dépuratif ». Diurétique, il est précieux pour les reins et la vessie, et se montre utile dans l’hydropisie, les calculs urinaires. Ses vertus expectorantes le font toujours recommander aux bronchiteux et aux coquelucheux.
A l’extérieur, le Cresson pilé est parfois employé comme résolutif sur les ulcères et les fluxions dentaires. Ses feuilles mâchées crues sont excellentes pour raffermir les gencives et, paraît-il, pour éviter les maux de dents. Depuis les maîtres de l’école de Salerne, le Cresson est toujours estimé en lotion capillaire pour combattre la chute des cheveux.
Précisons que la chaleur entraînant l’évaporation de son principe actif, très volatil, le Cresson doit toujours être employé cru, sous forme de suc pur ou mêlé à un liquide froid, si on veut lui garder ses propriétés thérapeutiques. Cuit, il ne conserve que sa valeur alimentaire.
Le Cresson alénois (Lepidium sativum), la jolie Cardamine (Cardamine pratensis), qu’on appelle encore Cresson élégant ou Cresson des près, possèdent les propriétés antiscorbutiques, dépuratives et diurétiques du Cresson de fontaine.
Epinard
Inconnu des Perses et des Romains, il nous est venu au XIIIème s., introduit en France par les Croisés. Les Arabes l’appréciaient beaucoup et l’appelaient « le prince des légumes ». Plus prosaïquement, nous le surnommons « le balai de l’intestin », car, en effet, il jouit des propriétés laxatives et dépuratives incontestables.
L’Epinard est aussi un antianémique de chois qui, en plus de sa richesse en chlorophylle, contient du fer et deux vitamines antianémiques : l’acide folique et la vitamine B12. Sa réputation de lutter contre les pâles couleurs est établie depuis longtemps ; on le recommande dans l’anémie, la chlorose, les convalescences et chaque fois qu’une perte sanguine justifie un remontant approprié (règles trop abondantes, crachements de sang, etc.). Toutefois à cause de l’acide oxalique qu’il contient, il est interdit aux arthritiques, aux rhumatisants, aux goutteux.
Le Chénopode Bon-henri (Cheno-podium Bonus-Henricus), plante commune et sauvage de nos contrées, est souvent consommé cuit à la manière de l’Epinard, ce qui lui a valu le surnom d’Epinard sauvage. Comme l’Epinard vrai, il est rafraîchissant, laxatif et dépuratif. Le Dr Leclerc dit qu’il peut-être consommé même par les arthritiques.